J'ai parcouru ces terres sans autre but que l'apaisement dans la rencontre. Mon esprit et mon coeur sont encore si troublés. Peut être le seront-ils toujours un peu. Qu'y puis-je si la seule chose qui me commande est Autrui qui se présente à moi? Dès lors que son visage m'apparaît, j'en suis responsable. Rien d'autre n'existe à ce moment là, ni en dessus, ni en dessous. Juste l'écoute et la parole donnée ; juste la sincérité d'un regard plongeant dans celui de l'autre et d'une voix franche qui énonce la vérité. Ainsi va ma vie. Je ne sais que peu de choses sur ma naissance et je vous l'ai déjà décrite, comme je vous ai décrit mon enfance auprés de cet ermite alchimiste qui m'a élevé et que je considère comme mon père. Il semblerait que je sois né d'un oeuf et il semblerait que les alchimistes n'aient jamais vu ce genre de coquilles d'oeuf sur ce continent. Un jour, je partirai d'Amakna. Si je veux connaître mes origines, je n'ai pas le choix. Mais ce jour n'est pas encore arrivé. J'ai tant de choses à faire ici d'abord et je ne peux les faire seul. J'ai besoin de partager cette sincérité pacifiste, j'ai besoin d'échanger, de donner et de recevoir. Le sourire m'apaise. La main tendue me redonne courage. Celle que je tend reflète l'espoir. Peu m'importe le référent, je connais déjà certains d'entre vous. Alors si quelqu'un peut me supporter ; pourquoi pas toi, mon ami Pandakands. Ou alors, comme je n'ai pas peur de l'inconnu, pourquoi pas quelqu'un que je ne connais que peu. J'aime faire connaissance ; c'est comme une ouverture, un partage d'idées nouvelles, une progression mutuelle. Jadis, j'étais parmi vous encore. Longtemps, mon coeur était en harmonie avec le vôtre et puis, je ne sais pas les battements de mon coeur devenant irréguliers, j'ai perdu cette harmonie. Naguère je suis parti et j'ai rencontré des chevaliers. J'ai eu beau dire à leur chef que je n'aimais pas les corps d'armée, il a quand même tenu à m'offrir une armure. Je n'ai pas osé refuser, ça ne se fait pas de refuser un cadeau. Alors, devant son insistance, j'ai fini par accepter pour ne pas le froisser. Je ne l'ai jamais vraiment portée, elle ne m'allait pas. Trop grande pour ma petite taille de xélor et vu que je suis pur feu et que le métal conserve la chaleur, c'était une fournaise quand j'essayais de la porter. Je n'étais vraiment pas à l'aise avec ce machin sur le dos. J'avais l'impression d'être au coeur de l'enfer. Enfin, aujourd'hui, me revoici. Je ne sais pas si je vous ai manqué ; vous me le direz bien assez tôt. En ce qui me concerne, je sais que j'ai beaucoup pensé à vous en tout cas. Mais des fois, on pense trop, on ne communique pas assez et on en oublie la discussion. Enfin, assez parlé de moi justement, permettez-moi de vous présenter quelqu'un. C'est une petite fille, elle est adorable. J'ai fait sa connaissance au fond de mon trou de mineur, comme disent parfois mes collègues, quand je broyais encore du noir...mais ne vous inquiétez pas ; aujourd'hui, je ne broye tout au plus que du gris clair. Enfin, bref. Cette petite fille s'appelle Nomans-land, elle se sent seule et rêve d'un nouveau monde. Elle est très curieuse et s'intéresse à tout. Elle a voulu retourner avec moi dans cette mine où nous nous étions rencontrés. Elle a soif de découvertes et elle a voulu essayer le minage. Je n'ai pas voulu au début, c'est un travail pénible. Mais devant l'insistance de ses yeux pétillants qui me suppliaient, je n'ai pas pu résister ; je lui ai donc prêté ma pioche, aprés lui avoir montré le mouvement à faire. Elle a essayé, elle s'est faite mal au premier coup quand le bout pointu à cogner sur la paroi. Elle a fait "Aïïïïeuh" et juste derrière à rajouter "Mais c'est nul mineur!". Il faut bien avouer que ce n'est pas un métier pour une jeune fille. Pour qu'elle ne pense plus à la douleur qui parcourait ses poignets, je lui ai dit : "De toute façon, ce métier ne mine à rien". Ca l'a fait rire et elle a oublié qu'elle avait mal. Elle ne veut pas se battre et me dit toujours qu'elle ne veut pas que je me batte. Pour la rassurer, j'ai bu devant elle la potion d'oubli du métier de chasseur. C'est qu'elle n'aime pas la violence et elle n'aime pas non plus qu'on fasse du mal aux animaux, alors quand elle est avec moi, je ne me bats pas. Mais n'allez pas lui dire que je pars me frotter à quelques créatures féroces quand elle dort à poings fermés, elle aurait peur pour moi et ça la ferait pleurer. Elle pense que je ne suis qu'un simple maître mineur et ne sait même pas que je suis aussi cordonnier. Si elle savait pour ce dernier métier, elle me tendrait une certaine potion d'oubli et on se fâcherait peut être. J'ai tant travaillé pour en arriver où j'en suis que ça me ferait mal d'oublier ce savoir. Je suis loin d'être maître, mais les choses avancent bien. Plus tard, elle comprendra que tout cela n'est qu'un jeu, qu'elle ne fait que rêver dans un monde imaginaire et elle fera peut être comme moi, elle jouera les aventurières. Elle voudra alors apprendre les mots interdits, propres aux eniripsas, jusqu'à apprendre les mots qui blessent. Mais là, elle est très bien comme elle est pour l'instant et je l'aime comme ça. J'espère que vous l'aimerez aussi et j'espère que vous me pardonnerez de l'avoir imaginée, même l'espace d'une seconde, comme jamais elle ne devrait devenir.
"Ne sois pas timide Nomans-land. Montres-toi que les uamis voient ton visage."
La tête d'une petite fille apparue de derrière celle du xélor. Cela faisait une impression étrange, comme s'il n'y avait qu'un seul étre, mais avec deux visages. Les deux têtes commençèrent à discuter entre elles.
"Pourquoi m'as-tu amené ici Kameo?"
"Pour te présenter aux uamis."
"C'est qui les uamis?"
"Des personnes en quête d'un autre monde."
"Ah bon, mais ce n'est pas toi qui est dans un autre monde déjà? T'es toujours dans la lune."
"Hum... heu...Oui... et non, nous avons besoin d'être ensemble pour le bâtir."
"Mais je n'y connais rien en maçonnerie."
"Il n'y en a pas besoin et tu vas nous faire rater notre présentation si tu continues à dire des bêtises."
"Mais c'est toi qui me parle de bâtir."
"C'est juste une image."
"Ah d'accord. Ca veut dire quoi alors bâtir un autre monde?"
"Ca veut dire beaucoup de choses."
"Comme quoi?"
"Reconnaître ses amis dans le partage par exemple."
"Ah bon? Mais, je ne possède pas grand chose."
"Bien sûr que si. Tu as du coeur et tu inspires la paix."
"Ca se partage la paix?"
"Disons que tu l'emmènes partout où tu vas. Aprés, ça se vit dans la rencontre, dans l'échange, dans le dialogue et c'est ainsi qu'elle se propage."
"Aaaah! Mais, tu me présentes à des amiiis alors. Il fallait le diiire." dit-elle d'une voix à la fois enjouée et aiguë.
"Hé mais ce n'est pas une raison pour crier comme ça" dit le xélor en frottant l'une de ses oreilles."
La jeune fille s'enhardit, sortit de derrière le xélor en faisant un pas de côté et dit :
"Chouette alors, mais si j'avais su, j'aurai amené quelque chose."
"Ta présence suffit je pense."
"Oui mais quand même, une boîte de chocolat par exemple, ça aurait été bien."
Le xélor s'impatienta un peu :
"Ce n'est pas croyable. Tu es une vraie pipelette Nomans-land. J'avais presque fini là."
"Et c'est toi qui me dit ça! Tu parles tout le temps ; ce n'est pas juste, je n'ai même pas commençé moi." dit elle d'un air boudeur.
"Très bien. Commençons ensemble alors et dis avec moi."
"C'est une belle journée pour poster chez les UAMis." "Pfff, t'es bête toi. Il pleut." dit-elle tout en croisant les bras.
"Bon t'as gagné. Va pour les chocolats. Mais on les amènera la prochaine fois d'accord?"
"Ah tu vois que j'ai raison, tu viens voir les uamis et tu n'as pas emmené de cadeau. Je le savais bien que tu étais toujours dans la lune."
"C'est entendu Nomans-land, tu as raison. Maintenant on peut dire la phrase magique? Les uamis s'impatientent là."
"Heu... oui ...mais j'ai oublié la phrase." dit-elle embarassée.
Le xélor susurra la phrase à l'oreille de la jeune fille :
"Prête maintenant?"
"Oui" dit-elle avec un sourire radieux.
Le xélor prit la main de l'eniripsa et lui demanda :
"Ensemble?"
"Ensemble!"répondit elle d'un air décidé.
"C'est une belle journée pour poster chez les UAMis."