(texte inspiré par l'histoire de Trashkette et de sa famille, à lire ici : http://www.tzunami-dofus.com/viewtopic.php?t=563).
Passent les nuages au-dessus d'Amakna, les abraknydes sont loin d'ici et seuls quelques échos inquiétants assombrissent le ciel, ceux de la guerre entre Bonta et Brakmar. À chaque fois que je viens dans cette clairière j'y pense, surtout quand le feu du ciel rougeoie au-dessus de la cimes des frênes. J'entend parler de hordes barbares, d'anges et de démons, se livrant bataille dans toutes les provinces.
Hier, ils ont brûlé la ferme d'une famille d'honnêtes paysans.
" Pour l'exemple " selon les communiqués officiels.
" Nous allons assainir la zone " disent les Anges.
" Nous allons exterminer la vermine céleste " disent les Démons.
Le résultat est ce sentiment de crainte qui grandit parmi les plus gentils. L'effroi gagne chaque jour du terrain et il vient à nos oreilles que certains alignés s'en prendrait à des citoyens d'Astrub ni Ange, ni Démon, par… erreur.
Je relis les livres de la bibliothèque de l'Église d'Amakna et je constate que le mot Chevalerie est bafoué chaque jour.
" Nul ne naît chevalier " dit l'adage et pourtant je vois chaque jour de jeunes recrues enrôlées pour servir de chair à canon, de fantassins sans prestige et au final de victimes anonymes, pire : de nouvelles raisons de continuer la guerre. Cette guerre sans fin.
La Chevalerie sert à défendre ceux qui ne peuvent se battre.Où sont ils ces glorieux chefs d'état bontariens et brakmariens ? Sans doute pétris du sang nouveau des ruines que leurs troupes ont semées.
" Nous allons assainir la zone. Tout ira bien, nous prenons le contrôle. "
Amakna se meurt de tant d'ironie. On réquisitionne les champs, on coupe les forêts, on empoisonne les cultures… Dire que le Prêtre qui m'a élevé désire que je devienne forgeronne et bontarienne.
" La guerre est en nous Alison, pas dans les armes. Un jour tu devras défendre tes idéaux et te faire respecter. Tu devras vivre en dehors de la clandestinité alors si tu dois revenir au pays d'Ulwarth entraînes toi, ne perds pas ton temps à rêvasser. Deviens Ange, avec eux tu es sûre d'avoir un commerce facile, mais ne t'enrôle pas dans cette guerre. N'agresse jamais personne ou tu prendras goût au sang des malheureux… et ne rêvasse pas ma fille ! "
Oui j'aime rêvasser, la tête dans les pissenlits, ce champ exhale des parfums si précieux et si suaves, on sent la mûre et la myrtille, les champs-champs laissent échapper des fragrances épicées et poivrées, l'herbe folle sent la chlorophylle et le thym. Quelques jonquilles apportent des touches sucrées, certaines roses se pâment toute la journée, espérant rivaliser de grâce avec le toucher velouté des dangereuses roses obscures…
Qu'importe la guerre. Et si je devenais paysanne ? Ou boulangère ? Et puis je pense à mes parents et je me dis que le Prêtre a raison. Je suis sans doute rêveuse mais je devrais concrétiser mes rêves alors je devrais savoir me défendre aussi et côtoyer des " chevaliers " , il doit bien y en avoir des nobles aussi !
Une goutte de pluie tombe sur mon épaule. Je ne suis pas loin de l'Église, je vais courir à travers champ ma robe blanche glissera sur les herbes, je suis pieds nus, contact avec la Terre. Je sens en moi un feu tellurique prêt à émerger, je suis une étincelle, mon esprit vole au-dessus des arbres, au-dessus des nuages, rien de ce que j'accomplis ne m'est étranger. Il faut suivre son cœur, toujours…
Un jour, les petits, les faibles, les exploités, les terrifiés, les meurtris, les perdants prendrons leur revanche et nous serons en première ligne.
Alison
(texte écrit à l'âge de 15 ans)
John William Waterhouse : Ophelia